Uncrime, un enquĂȘteur, un coupable. Classique. Mieux: historique, puisque ce roman policier date de la fin du Second Empire et marque la naissance du genre. Mais c'est aussi un polar, un vrai, Ă lire d'une traite. MĂ©chinet, dans la grande lignĂ©e des Sherlock Holmes, Hercule Poirot et autres Maigret, attend. II est patient, MĂ©chinet. DĂ©bonnaire, attentif aux
Lorsque jâachevais mes Ă©tudes pour devenir officier de santĂ© âcâĂ©tait le bon temps, jâavais vingt-trois ans â je demeurais rue Monsieur-le-Prince, presque au coin de la rue Racine. Jâavais lĂ , pour trente francs par mois, service compris, une chambre meublĂ©e qui en vaudrait bien cent aujourdâhui ; si vaste que je passais trĂšs aisĂ©ment les manches de mon paletot sans ouvrir la fenĂȘtre. Sortant de bon matin pour suivre les visites de mon hĂŽpital,rentrant fort tard parce que le cafĂ© Leroy avait pour moi dâirrĂ©sistibles attraits, câest Ă peine si je connaissais de vue les locataires de ma maison, gens paisibles tous, rentiers ou petits commerçants. Il en est un, cependant, avec qui, peu Ă peu, je finis par me lier. CâĂ©tait un homme de taille moyenne, Ă physionomie insignifiante,toujours scrupuleusement rasĂ©, et quâon appelait, gros comme lebras, monsieur MĂ©chinet. Le portier le traitait avec une considĂ©ration touteparticuliĂšre, et ne manquait jamais, quand il passait devant saloge, de retirer vivement sa casquette. Lâappartement de monsieur MĂ©chinet ouvrant sur mon palier, justeen face de la porte de ma chambre, nous nous Ă©tions Ă diversesreprises trouvĂ©s nez Ă nez. En ces occasions, nous avionslâhabitude de nous saluer. Un soir, il entra chez moi me demander quelquesallumettes ; une nuit, je lui empruntai du tabac ; unmatin, il nous arriva de sortir en mĂȘme temps et de marcher cĂŽte Ă cĂŽte un bout de chemin en causant⊠Telles furent nos premiĂšres relations. Sans ĂȘtre ni curieux ni dĂ©fiant â on ne lâest pas Ă lâĂąge quejâavais alors â on aime Ă savoir Ă quoi sâen tenir sur le comptedes gens avec lesquels on se lie. Jâen vins donc naturellement, non pas Ă observer lâexistence demon voisin, mais Ă mâoccuper de ses faits et gestes. Il Ă©tait mariĂ©, et madame Caroline MĂ©chinet, blonde et blanche,petite, rieuse et dodue, paraissait adorer son mari. Mais la conduite de ce mari nâen Ă©tait pas plus il dĂ©campait avant le jour et souvent le soleil Ă©taitlevĂ© quand je lâentendais regagner son domicile. Parfois ildisparaissait des semaines entiĂšres⊠Que la jolie petite madame MĂ©chinet tolĂ©rĂąt cela, voilĂ ce queje ne pouvais concevoir. IntriguĂ©, je pensai que notre portier, bavard dâordinaire commeune pie, me donnerait quelques Ă©claircissements. Erreur !⊠à peine avais-je prononcĂ© le nom de MĂ©chinetquâil mâenvoya promener de la belle façon, me disant, en roulant degros yeux, quâil nâĂ©tait pas dans ses habitudes de moucharder »ses locataires. Cet accueil redoubla si bien ma curiositĂ© que, bannissant toutevergogne, je mâattachai Ă Ă©pier mon voisin. Alors, je dĂ©couvris des choses qui me parurent Ă©normes. Une fois, je le vis rentrer habillĂ© Ă la derniĂšre mode, laboutonniĂšre endimanchĂ©e de cinq ou six dĂ©corations ; lesurlendemain, je lâaperçus dans lâescalier vĂȘtu dâune blousesordide et coiffĂ© dâun haillon de drap qui lui donnait une minesinistre. Et ce nâest pas tout. Par une belle aprĂšs-midi, commeil sortait, je vis sa femme lâaccompagner jusquâau seuil de leurappartement, et lĂ lâembrasser avec passion, en disant â Je tâen supplie, MĂ©chinet, sois prudent, songe Ă ta petitefemme ! Sois prudent !⊠Pourquoi ?⊠à quel propos ?Quâest-ce que cela signifiait ?⊠La femme Ă©tait donccomplice !⊠Ma stupeur ne devait pas tarder Ă redoubler. Une nuit, je dormais profondĂ©ment, quand soudain on frappa Ă maporte Ă coups prĂ©cipitĂ©s. Je me lĂšve, jâouvre⊠Monsieur MĂ©chinet entre, ou plutĂŽt se prĂ©cipite chez moi, lesvĂȘtements en dĂ©sordre et dĂ©chirĂ©s, la cravate et le devant de sachemise arrachĂ©s, la tĂȘte nue, le visage tout en sang⊠â Quâarrive-t-il ? mâĂ©criai-je Ă©pouvantĂ©. Mais lui, me faisant signe de me taire â Plus bas !⊠dit-il, on pourrait vous entendre⊠Ce nâestpeut-ĂȘtre rien quoique je souffre diablement⊠Je me suis dit quevous, Ă©tudiant en mĂ©decine, vous sauriez sans doute me soignercela⊠Sans mot dire, je le fis asseoir, et je me hĂątai de lâexamineret de lui donner les soins nĂ©cessaires. Encore quâil y eĂ»t eu une grande effusion de sang, la blessureĂ©tait lĂ©gĂšre⊠Ce nâĂ©tait, Ă vrai dire, quâune Ă©rafluresuperficielle partant de lâoreille gauche et sâarrĂȘtant Ă lacommissure des lĂšvres. Le pansement terminĂ© â Allons, me voilĂ encore sain et sauf pour cette fois, me ditmonsieur MĂ©chinet. Mille remerciements, cher monsieur de grĂące, ne parlez Ă personne de ce petit accident, etâŠbonne nuit. Bonne nuit !⊠Je songeais bien Ă dormir,vraiment ! Quand je me rappelle tout ce quâil me passa par la cervelledâhypothĂšses saugrenues et dâimaginations romanesques, je ne puismâempĂȘcher de rire. Monsieur MĂ©chinet prenait dans mon esprit des proportionsfantastiques. Lui, le lendemain, vint tranquillement me remercier encore etmâinvita Ă dĂźner. Si jâĂ©tais tout yeux et tout oreilles en pĂ©nĂ©trant danslâintĂ©rieur de mes voisins, on le devine. Mais jâeus beauconcentrer toute mon attention, je ne surpris rien de nature Ă dissiper le mystĂšre qui mâintriguait si fort. Ă dater de ce dĂźner, cependant, nos relations furent plussuivies. DĂ©cidĂ©ment, monsieur MĂ©chinet me prenait en une semaine sâĂ©coulait sans quâil mâemmenĂąt manger sasoupe, selon son expression, et presque tous les jours, au momentde lâabsinthe, il venait me rejoindre au cafĂ© Leroy, et nousfaisions une partie de dominos. Câest ainsi quâun certain soir du mois de juillet, un vendredi,sur les cinq heures, il Ă©tait en train de me battre Ă pleindouble-six, quand un estafier, dâassez fĂącheuse mine, je leconfesse, entra brusquement et vint murmurer Ă son oreille quelquesmots que je nâentendis pas. Tout dâune piĂšce et le visage bouleversĂ©, monsieur MĂ©chinet sedressa. â Jây vais, fit-il ; cours dire que jây vais. Lâhomme partit Ă toutes jambes, et alors me tendant la main â Excusez-moi, ajouta mon vieux voisin, le devoir avant toutâŠnous reprendrons notre partie demain. Et comme, tout brĂ»lant de curiositĂ©, je tĂ©moignais beaucoup dedĂ©pit, disant que je regrettais bien de ne le point accompagner â Au fait, grommela-t-il, pourquoi pas ? Voulez-vousvenir ? Ce sera peut-ĂȘtre intĂ©ressant⊠Pour toute rĂ©ponse, je pris mon chapeau et nous sortĂźmesâŠ
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RĂ©sumĂ©par chapitres. Chapitre 1 : Voyager est la seule chose utile, cela fait travailler lâimagination. Chapitre 2 : Il dit que sâil nâen avait pas besoin pour vivre, il supprimerait tout. Le « voyage » est le pire des livres. Il va ĂȘtre huĂ©. Chapitre 3 : Ferdinand et Arthur discutent de la vie, de la politique, de la guerre. Ferdinand sâengage, ça a lâair drĂŽle ?
Onglets livre RĂ©sumĂ© Le petit vieux des Batignolles est une histoire policiĂšre des plus classiques un meurtre, une victime, un enquĂȘteur et, forcĂ©ment⊠un coupable. Ecrit Ă la fin du Second Empire, cette histoire voit naĂźtre MĂ©chinet, un enquĂȘteur dĂ©bonnaire et patient qui, bien avant Holmes, Poirot ou Maigret, va mettre en place les mĂ©canismes subtils de lâinvestigation policiĂšre. Il nâhĂ©site pas Ă se lancer sur plusieurs pistes, Ă revenir sur ses pas, sur ses premiĂšres impressions, voire Ă tout reprendre de zĂ©ro pour rĂ©soudre son Ă©nigme. Car, pour lui, une seule chose compte, dĂ©couvrir qui a tuĂ© le petit vieux des Batignolles. DĂ©tails Partager via Facebook Partager via Twitter Partager via Pinterest Partager par Mail Imprimer la page Avis des lecteurs